déterminisme et planète maléfique

Comment le déterminisme vous condamne à être une victime des étoiles

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Votre approche de l’astrologie tient-elle du déterminisme, ou au contraire fait-elle la part belle au libre arbitre ? Ce sont des question fondamentales, auxquelles Dane Rudhyar a consacré de nombreuses pages. En particulier cet article très clair. Il aide à comprendre les enjeux de ce choix de position : comment prendre en compte les « influences » planétaires ? Comment avoir une vision holistique de votre thème, et donc de votre vie ?

Devez-vous être la victime de vos étoiles ?

Un article de Dane Rudhyar

Vous voulez déterminer si l’astrologie a vraiment de la valeur en tant que guide pour une vie plus riche ? Alors il importe d’aborder, d’analyser et de traiter certaines questions fondamentales.

Avons-nous vraiment une volonté « libre », un choix « libre » ? Qu’est-ce qui procure les données qui nourrissent nos jugements de valeur ? Jugements sur lesquels se fondent les décisions cruciales – les choix libres. Au-delà se pose un problème encore plus profond : lorsqu’une personne dit : « Moi, M. Untel, je prends cette décision », qu’est-ce qui, en elle, conduit à ce choix ?

Les philosophes ont dû faire face à cette question depuis Freud et la psychologie des profondeurs. Qui, ou qu’est-ce que le « je » ? Au moment de la décision, qu’est-ce qui fait le choix ? S’agit-il de la totalité du « moi » ou seulement d’une partie ? Car nous avons maintenant compris que l’homme opère à des niveaux conscients et inconscients ? Si on peut prendre des décisions « libres » – ou aujourd’hui nous pouvons dire « authentiques » -, qui les prend ? Ou quoi ?

Une astrologie fondée sur l’idée que les planètes, le Soleil et la Lune nous poussent ou nous « obligent » à agir d’une certaine manière, en fonction de notre thème de naissance, semble nier le libre arbitre. Mais l’homme a-t-il le pouvoir de surmonter les pressions et les influences des étoiles ?

Le grand occultiste du XVIe siècle, Paracelse, a dit : 

« Tout ce que les étoiles peuvent faire, nous pouvons le faire nous-mêmes, car la sagesse que nous tenons de Dieu domine les cieux et règne sur les étoiles… L’âme de l’homme est composée des mêmes éléments que les étoiles. Mais de même que la sagesse du Suprême guide les mouvements des étoiles, de même la raison de l’homme dirige les influences qui tournent et circulent dans son âme. »

La vision traditionnelle repose sur une conception strictement dualiste de l’homme et de l’univers. Mais elle n’est plus acceptable pour beaucoup de gens aujourd’hui. Les expériences scientifiques sur les drogues, qui altèrent la personnalité, et l’hypnotisme, ainsi que les découvertes de la psychologie des profondeurs, nous ont montré une image très différente de l’être humain.

En accord avec la pensée moderne, un nouveau type d’attitude astrologique se développe. Une conception selon laquelle son thème de naissance représente un être humain individuel. Son thème révèle le modèle de semence de l’individualité de la personne. Et la structure de base du déroulement de sa vie. Comme le gland contient le germe et le calendrier de croissance du puissant chêne. Le chêne pourrait-il ignorer ou modifier ce qui était latent dans le gland dont il est issu ?

Déterminisme et libre arbitre

Dans quelle mesure pouvons-nous vouloir devenir ce que nous ne sommes pas ? Et si nous le pouvons, cela a-t-il un sens ? Le problème du « libre arbitre contre le déterminisme » a hanté les penseurs et les religieux occidentaux. Il a profondément affecté nos institutions politiques. Mais, à mon avis, on aborde ce problème de manière fallacieuse.

Il est possible de démontrer que l’intérêt considérable et durable que l’Occident porte à la « liberté de décision », par opposition à l’idée que le thème de naissance est « déterministe », comme ses progressions et ses transits, se fonde sur une image incomplète de l’évolution individuelle. Lorsqu’un individu atteint la vraie liberté, il en vient à accepter volontairement le destin conditionné par le moment et le lieu de sa naissance. Son libre arbitre tant vanté devient la « volonté du destin ». Il est entièrement déterminé par ce qu’il est en tant que personne. S’il est fidèle à lui-même, il ne peut choisir que ce qui lui est nécessaire. Nécessité et liberté sont donc intégrées en lui.

En termes d’astrologie, il existe un moyen pour un individu de transcender l’influence supposée d’une planète particulière. Il ne peut cependant la transcender que dans le sens où il peut l’utiliser. La mettre au service de son approche individuelle de la vie, de son destin. Il ne peut le faire que s’il est devenu un « individu ». Un exemple simple suffira à expliquer ce que signifie être un individu.

Supposons que l’épouse d’un cadre new-yorkais très occupé se remette d’une grave bronchite. Son médecin lui prescrit de se rendre en Arizona pour sa convalescence. Elle y apprend à monter à cheval. Et elle se sent attirée par le jeune maître d’équitation avec lequel elle passe de longues heures chaque jour. Il est célibataire et elle croit qu’il désire une relation plus intime avec elle. Avoir une relation amoureuse pendant ces quelques semaines serait divertissant et tout à fait sans danger. C’est à elle de prendre la décision. Est-elle « libre » de décider ?

Déterminisme et libre arbitre

Le moraliste dira que, bien sûr, elle l’est. Mais se contenter de dire cela est une manière naïve et élémentaire d’évaluer une situation complexe. Cette femme n’est pas une simple entité homogène et monolithique. 

Elle existe à plusieurs niveaux.

Tout d’abord, elle est un être humain d’un certain âge. Cela la classe au niveau générique de tous les êtres humains. Ils respirent, ont faim, ont des pulsions sexuelles et répondent à des stimuli biologiques de base. Depuis sa naissance dans une famille américaine particulière, son être psychologique a été marqué par un ensemble défini d’impératifs sociaux. Modelé par les attitudes et les traditions de la famille et de la classe sociale. Imprégné des idées et des idéaux de la culture américaine. C’est son niveau culturel

Ensuite, elle est un organisme vivant avec des caractéristiques d’individualisation qui la rendent différente de ses sœurs nées dans le même environnement. Elle a donc réagi à la combinaison des forces génériques et culturelles en cherchant sa propre manière de répondre aux défis quotidiens. Bien qu’à ce niveau d’existence, elle puisse avoir des peurs, des complexes et des problèmes émotionnels, il s’agit de sa conscience du moi.

Cette femme, dans toute sa complexité, doit affronter la décision suivante : va-t-elle ou non se donner au cavalier fascinant ? Chaque niveau de sa personnalité aborde la question d’une manière différente. Sa nature sexuelle clame : “Oui !”. Son éducation morale tonne : “Non !”. La relation avec son mari, conditionnée par celles avec son père et ses frères. Sa peur de la grossesse. Et toute une série d’autres complexes peuvent entrer en conflit dans la sphère de sa conscience du moi.

Examinons maintenant la situation d’un point de vue astrologique. Supposons que sa Vénus est proche du Mars du maître d’équitation. Son Soleil en progression atteint son Uranus natal dans la quatrième maison. Tandis que Mars en transit passe sur sa Lune en Gémeaux (la bronchite). Cette intrigante combinaison planétaire va-t-elle la contraindre à céder à sa pulsion sexuelle générique. Ou forcer son ego à s’abandonner à un complexe de frustration et de solitude alimenté par un mariage insatisfaisant ? Où se trouve sa « liberté de choix » dans tout cela ? Qui est-elle ?

Ma réponse est qu' »elle » est le total de sa nature générique. Auquel s’ajoute le produit de sa culture. Plus le résultat des expériences de l’enfance et de l’adolescence. Enfin, la situation du désert de l’Arizona et le maître d’équitation qui s’y trouve. Le point essentiel devient cependant : cette situation totale est-elle intégrée de manière à ce qu’elle puisse prendre une « décision libre » ? Est-elle une personne individuelle consciente de son identité et de son moi ?

Si une telle intégration n’a pas eu lieu, une bataille fera rage dans sa personnalité. La « force » la plus puissante l’emportera, réduisant temporairement les autres facteurs à une importance relative. Mais explorons cette « intégration ».

Chaque organisme humain possède un thème de naissance unique. Chaque nouveau-né possède certains traits de différenciation et peut potentiellement devenir un « individu ». Un tout indivisible avec un rythme d’existence particulier. Mais le nourrisson ne peut en avoir conscience car son cerveau-esprit n’est pas encore développé.

Pour développer cet esprit conscient, des groupes d’êtres humains plus ou moins cohérents et permanents ont construits des types définis de traditions culturelles, religieuses et socio-éthiques. D’abord des tribus, puis des royaumes, des nations, etc. Chaque enfant développe son esprit et sa conscience en utilisant le langage et en suivant les modèles établis par la famille, l’école et la société.

Au cours de la phase prénatale, le fœtus est entouré de la matrice formatrice de l’utérus maternel. Mais une fois né, l’enfant reste enfermé dans un utérus psychique. Son esprit et son ego s’y développent et y mûrissent progressivement. 

Le fœtus n’est pas libre à l’intérieur de l’utérus, si ce n’est pour bouger un peu. Mais l’adolescent est-il « libre » lorsqu’il grandit dans les entrailles psychiques de la famille, de la culture, des traditions et de l’université ? Certes, il peut bouger beaucoup, mais pourtant son environnement physique, culturel et social le conditionne entièrement.

Le philosophe qui croit au « déterminisme » affirme que l’adolescent est en fait complètement déterminé. Qu’il suive passivement ou se rebelle contre son environnement. De même, l’astrologue qui croit à « l’influence fatale » de telle ou telle planète dira que l’être humain est contraint d’agir en fonction de la position de telle ou telle planète dans son thème.

Le fœtus finit par sortir du ventre de sa mère et fait l’expérience d’un degré croissant de liberté musculaire. De même, l’enfant ayant achevé une certaine forme d’éducation devrait pouvoir sortir du ventre psychique de sa famille, de sa culture et de sa tradition sociale. Pour renaître en tant qu' »individu ». Leur quête souvent passionnée et trépidante d' »identité » atteste du fait que les jeunes d’aujourd’hui sont plus que jamais conscients de cette possibilitéd’être pleinement eux-mêmes. Voire de cette exigence

À mon sens, seule la personne qui s’est dégagée des matrices de son conditionnement culturel et social peut être considérée comme réellement « libre de choisir ». Elle seule est capable de prendre des décisions authentiques. L’émergence de la matrice socio-culturelle signifie que l’individu « renaissant » se rend compte du conditionnement de son développement. Il découvre maintenant que son comportement n’a pas besoin d’être déterminé par des pressions ou des tractions uniques et distinctes comme celles qui ont été appliquées pendant sa maturation.

Lorsque vous avez faim, vos organes digestifs exercent une pression sur l’ensemble de votre organisme qui détermine un certain type de comportement. Vous devez manger. La même chose se produit lorsque les glandes sexuelles sécrètent des hormones qui suscitent en vous le désir de satisfaction sexuelle. Une seule fonction particulière, parmi les nombreuses qui sont normalement à l’œuvre dans votre corps, s’empare de votre comportement et de vos pensées. Elle pousse le corps vers la satisfaction qu’il recherche.

Lorsque cela se produit, vous n’êtes pas libre. Car un individu est la totalité de toutes ses fonctions à tous les niveaux de l’existence. Mais vous cessez d’être le vrai « vous » (votre véritable identité globale) au moment où l’une de vos fonctions prend le dessus. Quand elle contrôle les muscles, les énergies psychiques, l’imagination pour satisfaire sa propre finalité.

En fait, cette situation ressemble à ce qui se passe dans la vie civique lorsqu’un groupe de pression particulier impose sa volonté à un organe législatif ou réussit à influencer radicalement l’esprit de l’exécutif. La liberté cesse alors d’être une réalité. Celui qui n’est pas entier et confiant dans son identité ne peut pas prendre de décisions réellement libres. Il agit comme un agent pour telle ou telle idée traditionnelle ou attitude collective.

Nous pouvons facilement voir comment cela s’applique à la question de l’astrologie et du libre arbitre. Et combien est inadéquate l’approche astrologique qui traite chaque planète et aspect comme s’ils étaient des influences déterminantes individuelles. Chaque planète considérée séparément est une force contraignante. Elle conduit l’organisme corps-esprit à la satisfaction de la fonction vitale qu’elle représente. Mais l’ensemble du thème de naissance est la signature de la liberté et de la destinée d’un homme. Car il s’agit du schéma directeur d’un individu.

Le ciel entier représente la personne qui est devenue véritablement un tout individualisé. Ou comme le disaient les philosophes médiévaux, un microcosme en résonance avec le macrocosme universel.

Lorsqu’un astrologue identifie une planète ou un aspect particulier comme indiquant une crise, un accident ou un coup de chance, il parle de servitude et non de liberté. Regardez le médecin qui isole un organe malade et traite la maladie. Au lieu de s’occuper de l’organisme tout entier et de mobiliser son propre pouvoir de guérison. Il aborde l’homme comme un mécanisme complexe en voie de désintégration inéluctable, engrenage par engrenage.

Revenons maintenant à cette femme en Arizona qui essaie de décider si elle doit avoir une relation amoureuse. 

Si elle suit ses pulsions sexuelles, ses actions sont déterminées. Son choix n’est pas libre. 

Si elle garde sa « vertu » en raison du code moral qu’on lui a enseigné, elle n’est pas libre non plus. Le pouvoir d’un précepte collectif-culturel-éthique la détermine. 

Si elle ne se soucie pas de la morale mais qu’elle est arrêtée par un complexe d’ego ou une considération strictement sociale, son choix n’est pas authentique. 

En fait, le caractère de la liberté ne réside pas dans le fait qu’elle ait ou non une liaison avec l’homme, mais dans le sens et le but de la relation amoureuse ou du renoncement à celle-ci.

En d’autres termes, seules comptent la façon dont elle fait face à la situation en tant qu’individu, la signification qu’elle lui donne, la qualité de son oui ou de son non. Ce sont les questions dans lesquelles elle peut exercer un véritable libre arbitre. Au niveau spirituel réel, rien ne la contraint et chaque désir, acte et pensée peut donner richesse, beauté et profondeur à son identité.

Astrologiquement, Mars va contraindre l’excitation sexuelle, Uranus va tendre à transformer et à renouveler sa capacité d’intimité avec les hommes (y compris son mari) et le transit de Mars sur sa Lune va réveiller sa féminité. Mais ces influences ne la contraindront pas si elle a émergé en tant qu’individu des matrices génériques et culturelles qui étaient autrefois nécessaires à son développement physiologique et psychologique.

En fin de compte, le seul véritable libre arbitre est celui du destin et les décisions vraiment libres sont celles qu’on ne « prend » pas, parce qu’elles sont si évidentes et nécessaires qu’on pourrait dire qu’elles se prennent d’elles-mêmes. La liberté que nous avons est de choisir d’être libre et de le rester. Nous sommes nés à un endroit et à un moment précis dans le vaste environnement de notre système solaire et de la galaxie tout entière. Cette équation lieu-temps, dont le thème de naissance est le symbole ou la signature, montre ce que l’être humain est potentiellement en tant que personne entière. Quel sens y aurait-il à lutter contre le destin, à vouloir être ce que l’on n’est pas ?